Chroniques

*Suites indiennes* ou l’Inde en clair-obscur

« À la faveur de je ne sais quelle épiphanie sensible, il arrive que le regard migre à l’intérieur du cœur, lequel se déploie et fleurit… »

Il y a des livres  qui nous débordent, nous submergent.

Avec *Suites indiennes*, Elisabeth Barillé ne nous offre pas un récit de voyage, mais un lent détachement vers l’essentiel.

Il s’agit de l’Inde bien sûr.  L’Inde un pays saturé de récits. Trop souvent, elle est réduite à un cliché de couleurs, d’odeurs, de chaos sacré. 

Dans *Suites indiennes*, Élisabeth Barillé prend un contre-pied radical : elle écrit l’Inde en sourdine, dans les blancs, les silences, les gestes retenus. Le livre agit comme un encens discret : il ne cherche pas à imposer, il flotte, il imprègne.

Au fur et à mesure de la lecture, nous comprenons  qu’une femme est en marche. Au fur et à mesure de notre lecture, nous comprenons qu’elle se défait, elle s’allège… pour mieux avancer. Pour mieux entrer dans le paysage

L’auteure ne triche pas. Elle s’en remet au réel de l’Inde, à sa violence douce, à son rythme hors du temps. 

Elisabeth Barillé a le sens du fragment. Elle écrit comme on dépose une offrande. 

*Suites indiennes* est un livre exigeant dans son dépouillement. Il ne cherche pas à séduire. Il n’explique pas l’Inde, il la murmure. Il nous désarme. 

Et peut-être, est-ce cela la vraie littérature du voyage… 

Extrait :

« On voyage depuis son tempérament, et en lui. L’enthousiasme domine le mien.

Qu’y puis-je s’il m’accompagne depuis mes premières nattes, si les épreuves, les échecs, les déconvenues, ne l’ont pas entamé ? Qu’y puis-je si m’enchantent mille et un petits riens ? Je suis ainsi faite : dans mon cœur cohabite une ascète et une frivole enfant.»

Elisabeth Barillé, *Suites indiennes*, Editions Des Instants.

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