Si vous voulez connaître « Le monde large », la force du mot possible et tant d’autres mots comme courage, exil, fiction, terre, écriture, il faut écouter Mala.
L’écouter jusqu’au bout.
C’est une double traversée. Mala Barbulescu a écrit une « fiction ». Nasha et Ada pourraient exister nous dit-elle. Mais elle ne les connaît pas et aucune n’est Mala…
Mais la terre remuée est la terre natale des trois femmes
Mala Barbulescu est auteure et parolière
La terre remuée est également la terre natale de son époux Dan Burcea
Agnès Clancier est une femme en urgence. Elle écrit. Elle traverse le monde. Elle écrit encore et elle re traverse le monde.
Les terres lointaines, les aventurières comme l’aviatrice et résistante Maryse Bastié, la fascinent.
Mais il faut écouter Agnès, la voir rire, réfléchir, tenter de poser le mot juste, d’expliquer pour nous, pour elle…et soudain sourire, s’attendrir…
Un nom comme une ancre… Karina
Sokolova. Sa fille adoptée. Agnès Clancier a écrit un livre avec pour titre : Karina Sokolova. C’est comme un album photos. Un livret de famille. Et quand Karina lui a demandé :
– Pourquoi tu m’as adoptée ?
Juste ces mots :
« Parce que tu n’avais pas de maman… et que je n’avais pas de petite fille »
Une phrase « absolue », une épiphanie.
Merci au Restaurant Les Éditeurs de nous avoir reçues.
Intrepide, décoiffante parfois, touchante, spontanée gracieuse, exigeante, douée, toujours avec cette force et ce fond de mélancolie elle avance souveraine.
Balustrade nous dit-elle, c’est un peu d’une chanson où le mot Bal accompagne la « petite fille aux allumettes », un peu de la beauté d’un lustre joyau, lumineux… et le reste.
D’une enfance cabossée, elle a retenu qu’il faut vivre coûte que coûte.
Elle a une connaissance parfaite du milieu de l’édition, de ses mirages, de ses joies. Elle lance des auteurs, leur fait faire parfois leurs premiers pas dans ce milieu que souvent ils connaissent mal.
Elle est drôle aussi, il faut l’écouter pour comprendre.
Et toujours les chats compagnons, confidents.
La considération nous dit-elle est ce qui relève l’autre.
À la Brasserie Lipp, infiniment remerciée, elle est chez elle Guilaine Depis.
Elle s’émeut, s’émerveille, se tient dans l’ombre pour laisser venir les souvenirs… elle entonne un chant… elle sort un album photos, elle passe la main sur les pierres…et puis l’Histoire… la terrible Histoire.
Et elle raconte… c’est beau ! C’est lumineux !
Avec *Paul Celan, Sauver la clarté* (éd. Unicité), Marie-Hélène Prouteau nous emmène dans une incroyable traversée.
Mandelstam, Nelly Sachs et tant d’autres apparaissent comme des compagnons de route.
Et puis, fresques murales,
correspondances, géographie, mémoire, tout devient signe, borne, pierre d’attente.
C’est une « calligraphie de lumière », qu’a su détecter Marie-Hélène Prouteau, écrit dans la préface Mireille Gansel.
Écouter Marie-Hélène Prouteau, c’est marcher avec Celan… pour apprendre à tenir…
« Devant la pluie à verse, un verdier décoiffe ses ailes. Imitons-le, si nous pouvons. Secouons le morne, la morosité. Touchons la lumière. Le temps n’est plus d’apprendre, sinon ceci : Partage ton savoir et meurs. Et toi, jeune, vis ton soûl… »
Dans *La Dernière Porte*, (Éditions Héloïse d’Ormesson), Lise Marzouk tisse un roman bouleversant, intime et lumineux, où la maternité devient espace sacré, lieu de bascule entre l’avant et l’après.
Dans le huis clos feutré d’une maternité parisienne, dix femmes traversent l’épreuve de l’accouchement. Face à elles, Clémence, une infirmière d’un mètre cinquante-cinq à peine, incarne le soin dans ce qu’il a de plus humain : prendre soin pendant et après de chaque femme venue accoucher. Tenter de leur laisser un peu de douceur même quand certaines repartent les bras vides.
Le silence aussi parfois en bandoulière… en garrot…
Dix chapitres, dix “portes”, comme autant de seuils de vie.
Le roman n’est ni médical ni théorique : il parle du réel, dans ce qu’il a de douloureux, de miraculeux, de profondément humain.
Et la plume de Lise Marzouk : « forte », le mot juste, aguerrie à l’attente, à la peur, à l’espoir…
Il est intraitable (entre autres) sur des citations dans un texte, posées ça et là pour faire « cultivé » :
« La citation n’est pas un extrait / la citation est une cigale / sa nature est de ne pouvoir se taire… »*
L’écrire, chez Guillaume Basquin, est un acte d’engagement radical, un geste esthétique et politique à contre-courant de la littérature marchande et normée.
Pour lui, l’écriture n’est pas un simple moyen de raconter, mais une expérience, un corps à corps avec la langue, une façon de désécrire autant que d’écrire.
L’écrire de Basquin est aussi politique, au sens large.
Non partisan, mais résistant.
Résistant à la standardisation, à l’édition de masse, à la mort du risque littéraire.
Son épouse Christelle Mercier et lui ont créé les Editions Tinbad et une revue *Les Cahiers de Tinbad*
Guillaume Basquin est un homme doux aux rêves simples, ceux d’une famille heureuse et tendre.
Mais Guillaume Basquin éditeur et auteur est « un insurgé ». Envers et contre tous, il veut sauver le langage, la littérature, le livre papier, la musique et les films en argentique.
Et quand on lui demande quel est son rêve, il sourit ému et pudique et avoue rêver d’être de ces « perdants magnifiques… » !
« La nuit je mens / Je prends des trains à travers la plaine / La nuit je mens / Je m’en lave les mains /J’ai dans les bottes des montagnes de questions / Où subsiste encore ton écho… »*
Une Escale de Jeanne comme entourée d’un liquide amniotique…Une plongée dans un livre *Où subsiste ton écho* ( Éditions L’incertain).
Et puis le suicide de la mère d’un des personnages du livre.
Une thalasso pour reprendre souffle, sortir de l’apnée…
Une recherche du repos, de rédemption…
Accepter cet espace de non lieu derrière le miroir…
Accepter sa vie… le seul espace à soi…
Et l’espace est ouvert…
Aline Angoustures peut continuer de chanter. Elle a dressé un bivouac. Son bivouac…
C’est l’écriture…là où la tente est plantée.
Nomade oui, mais plus jamais errante…
Ni dans le suicide de la mère, ni dans l’échec peut-être de l’éducation du fils… ni …
Celle qui travaille sur le « Droit d’asile, celle qui est Historienne sait maintenant que quoi qu’il arrive, la vie refleurira.
Pour ses personnages et pour elle…
– Aline Angoustures, *Où subsiste ton écho*, Editions L’Incertain